Le théâtre – les montreurs d’images, cet été, a implanté son chapiteau dans un lieu magnifique sur un plateau des hautes montagnes des Alpes, à NAX en valais, au pied du Mont-Noble, tel un vaisseau spatial arrivé du ciel.
C’est avec bonheur que nous avons créé une nouvelle version de THEODA de S.Corinna Bille pour le lieu très particulier de notre chapiteau avec la complicité de notre ami Daniele Pintaudi, pianiste et comédien dans le rôle de Rémy, Bozena Nesvacilova, jeune danseuse tchèque, dans le rôle de Théoda et Morgane Melly qui a admirablement habité le personnage de Marceline enfant. Une animation au sein de l’école primaire et enfantine du village de Nax avec “la petite danseuse et la marionnette” du même auteur et la visite du chapiteau nous a permis de créer des liens émouvants avec les enfants.
Les stages de danse-théâtre pour les enfants et le adultes ont donné naissance à une nouvelle école depuis le mois d’octobre. Un projet de spectacle autour de S. Corinna Bille verra le jour avec les participants en été 2009.
Nous avons obtenu le soutien de la commune, la commission culturelle, l’office du tourisme, la société de développement de Nax, la loterie romande Valais, le Service de la Culture de l’Etat du Valais et la compagnie Interface.
Des peintures dans la salle de danse
(Une histoire d’images)
ou
Rencontre avec Monique Décosterd
Entre elle et moi, c’est sans paroles.
Son travail, mon travail, ensemble dans son lieu. Le mouvement du projet vient de loin, d’il y a longtemps.
J’ai vu presque tous ses spectacles.
Elle a vu toutes mes expositions.
J’ai fait son portrait dans les années quatre-vingts, elle aimait venir poser, elle se sent très bien dans un atelier. Depuis que l’on se connait elle aime à s’entourer de quelques uns de mes dessins et peintures dans sa salle de danse.
Au sous-sol, son théâtre n’est pas un théâtre.
C’est un ancien garage.
Il m’arrive de penser que Momo, d’un coup de baguette magique, a transformé ce lieu en un espace où les rêves deviennent tangibles. Je savais son désir de monter Théoda de Corinna Bille.
Il y a longtemps, tout comme elle, j’ai lu et aimé ce livre.
Un soir elle l’a joué rien que pour moi. Les images de sa Théoda sont entrées tout naturellement dans ma peinture.
Bernadette Babel
Chère Momo,
Tu me demande un c.v…….j’essaie
Je suis née à Compesières en 1951. Après avoir terminé l’école des beaux-arts, j’ai quitté ma campagne. En ville, je gagnais à mi-temps ma vie et louais avec des camarades un atelier rue Vautier (mon tout premier atelier étant le grenier à pommes de ma grand-mère).
A la Jonction, j’ai connu les gens qui m’ont fait te rencontrer toi et ton travail.
J’ai toujours peint. Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé les jours ordinaires, sans histoire, quand tout est calme et enfin rangé, je vais à l’atelier, et là, je peux, dans le silence de l’après-midi, commencer à peindre.
Depuis bientôt 20 ans, j’enseigne le dessin, à mi-temps, à l’école primaire. Je fais des expositions, etc…
En 2006 j’avais fait le projet de création intitulé LES MILLE ET UNE DEMEURES, malheureusement nous n’avons pas trouvé l’accueil espéré auprès des décideurs d’attributions de fonds pour les projets culturels. A notre grand étonnement d’ailleurs.
Ce projet autour de deux grandes dames suisses, l’une photographe Suzi Pilet qui fêtait ses nonante ans cette année-là, et S.Corinna Bille écrivain décédée en 1979, méritait d’être réalisé.
Nous avons dû renoncer à monter la totalité du projet et seule la première partie a été réalisée et jouée au théâtre – les montreurs d’images en décembre 06 et janvier 07.
A cette occasion Suzi Pilet et son association en collaboration avec le théâtre – les montreurs d’images a publié un carnet d’un choix d’une série de photos prises par cette dernière lors de nos spectacles entre 1978 et 1989.
A cette occasion encore nous avons exposé notre collection privée des photos de Suzi et elle nous a fait l’honneur de sa présence et a dédicacé son carnet. Vous pouvez vous le procurer au Théâtre les montreurs d’images ou par mail. (10 frs plus le port )
Les mille et une demeures
Hommage
Deux femmes
Deux oeuvres
Qui témoignent
D’une audace de vie
Sortie des sentiers parcourus
Deux femmes qui ont osé
Osé être
Osé vivre
Osé l’éphémère
Osé questionner
Sans crainte des non-réponses
Osé le vertige
Sources intarissables
Pour moi depuis trente ans
Monique Décosterd
Notes d’intentions sous forme de trois lettres à Louis
Lettre à Louis 1 | Lettre à Louis 2 | Lettre à Louis 3
“Elle avait mis sa robe la plus belle et marchait de sa démarche habituelle qui faisait dire aux Terrouans: “Elle part pour une fête”. D’une main elle relevait sa jupe par mépris de la poussière et de ce geste la soulevait, tout entière, au dessus de la foule”.
La première partie
Theoda est un monologue tiré d’une adaptation du roman éponyme de S. Corinna Bille. Par ce texte magnifique, je souhaite poursuivre l’exploration de l’oeuvre de Corinna Bille, après avoir mis en scène «La petite Danseuse et la Marionnette et Les Oeufs de Pâques.
Dans un champ de coquelicots, une petite fille redresse les fleurs qui ont été couchées par une tempête. Alors que le sort de Théoda et de Rémi est sur le point de se sceller, le champ de coquelicots se redresse et fleuri. Le geste de la petite fille va à contresens du récit. La vie jaillit de la remémoration de la passion qui a uni ce couple promis à une mort certaine.
La mise en jeu s’articule autour du champ de coquelicots et de Marceline enfant , d’une commode et d’un mannequin de couture, Marceline adulte sort des tiroirs de la commode les vêtements et les objets mémoire de Théoda. Le mannequin nu n’est rien, mais revêtu des atours de la protagoniste par la narratrice avec dévotion et émotion, il devient la beauté insolite et mystérieuse de Théoda.
“Maintenant que la beauté de Théoda avait frappé tout le monde, on se mit à la regarder et l’on vit sur elle ce qu’on avait pas découvert jusqu’alors. On vit que son teint, qu’elle protégeait du soleil était uni et fin, avec du rose sur les pommettes saillantes. Que ses yeux étaient d’un gris bleuté avec une pupille minuscule qui se dilatait le soir et faisait croire à des yeux sombres�Elle marchait dans la rue légèrement cambrée les bras immobiles le long de son corps, mais les mains se relevaient, tâtaient l’air comme deux gouvernails. Une mèche noire tombait sur sa joue, elle la laissait. Elle ne voyait rien. Elle écoutait chanter son corps. De ses deux mains, elle saisissait l’air, l’attirait à elle, s’en entourait. Elle savait qu’il était chargé du désir de Rémi. A la lumière de cet homme, son corps fleurissait. Elle devenait plus que belle; vivante. Et cette vie l’exauçait, la projetait hors d’elle-même. Chacun devait le sentir, partout où elle allait, les gens s’écartaient pour lui laisser la place, comme si ce fut une femme immense qui s’avançait. Elle ne leur donnait pas un regard. On l’a haïssait parce que ce bonheur provoquait chacun, le heurtait dans ce qu’il avait de plus secret, de plus cher: sa tranquillité.”
L’intermède
Les deux récits sont séparés par un intermède-entracte durant lequel le public assiste à la projection d’un film sur la photographe Suzi Pilet, film accompagné par des compositions jouées par le pianiste Daniele Pintaudi. Durant cet intermède, le public peut aussi admirer une exposition des photographies de Suzi Pilet.
La Seconde partie
Monologue tiré du texte de Suzi Pilet : «En forme de Véronique », (Editions Eliane Vernay)
Portrait de Suzi Pilet
Une femme jeune, vêtue de rouge, danse dans le même champ de coquelicots. Sur une table repose un livre d’Omar Khayyâm, un couteau, le bol de la «Reine des Nomades » (C. Bille), une chaise. Dans la chambre pousse un grand arbre symbolisant les quatre saisons. Un arbre comme celui décrit dans “Théoda”. Un arbre dont les branches n’ont jamais été taillées, dont les branches vont au bout d’elles-mêmes, comme ces deux femmes.«Ma plénitude m’inquiète, elle est intransmissible. Pourtant j’ai croisé Domingo Dominguez, le «matador» à la triste figure. Il était ivre, mais mon ivresse dépassait la sienne. S’en doutait-il? Un visage à cheveux noirsa, au regard dur, à la lèvre qui n’espérait plus; des yeux pourtant qui savaient être entre minuit et le petit jour d’une extraordinaire tendresse. Domingo, réussirai-je à vous faire parler? A vous faire sourire?»
Nous espérons pouvoir, un jour, réaliser la totalité du projet et faire connaître au public l’univers si singulier du texte en forme de Véronique de Suzi Pilet
Une petite galerie de photos
une nouvelle collaboration est en cours pour les représentations 2008 avec l’artiste-peintre genevoise Bernadette Babel qui depuis un an a axé son travail sur le thème de Théoda.
La petite danseuse et la marionnette
D’APRÈS UN CONTE DE S. CORINNA BILLE
La chorégraphe et danseuse Monique Décosterd, fondatrice du théâtre – les montreurs d’images, propose le spectacle La petite danseuse et la marionnette, tirée des nouvelles du recueil pour la jeunesse de S. Corinna Bille.
Cette histoire permet à la metteuse en scène d’aller à la rencontre des enfants, de les encourager à rêver encore, en ouvrant grand leurs oreilles.
Animé par ce désir de rencontre avec les jeunes (et les moins jeunes), Monique Décosterd souhaite ainsi transmettre une part de l’immense trésor que recèle l’oeuvre de cette auteure.
“Il n’y a guère que la danse pour exprimer le trop plein de bonheur” disait S. Corinna Bille- très jeune, elle avait assisté à la projection du film la petite parade de Ladislar Statevitch, célèbre animateur de marionnettes. Ce film associait des marionnettes et une petite actrice-danseuse.
“Je garde une impression si profonde de quelque chose de tellement beau, de si immensément pur, que l’âme en est tout éblouie et reposée” S. C.Bille.
“La petite danseuse et la marionnette” prend vie, dans le spectacle, sur les étagères de l’armoire familiale, grâce à la narration dansée de la conteuse et au monde miniature plein de charme réalisé par Valérie Margot
Car la miniaturisation a toujours fasciné S. C. Bille. Elle écrit à propos de cette nouvelle : “La petite danseuse et la marionnette vient de très loin, de mon désir d’autrefois sans doute de posséder des êtres lilliputiens vivants et chatoyants…”
La rêverie lilliputienne témoigne d’une inversion des valeurs, elle illustre la grandeur de l’infiniment petit. La danseuse, si petite, vit dans une poche et danse sur un tapis rouge, grand comme un mouchoir. Ce petit être éprouve un amour si grand pour le Paladin (la marionnette) qu’elle se laisse choir dans le vide du désespoir. “La petite danseuse venait de comprendre que le Paladin n’avait point d’âme, ni de coeur, ni de sang. Il ne vivait pas. Il était articulé au moyen de ficelles, une marionnette…”
Dans sa chute, elle est soutenue dans les airs par sa jupe de gaze qui se métamorphose en ailes transparentes. Elle s’envole et disparaît.
Monique Décosterd
Ce spectacle peut être joué lors d’anniversaires, de fêtes de quartier, dans les EMS, les bibliotèques, les foyers pour enfants, etc. D’une durée d’environ 30 minutes, il peut être suivi d’une animation (déguisements et maquillages des enfants).
N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez le produire.
biographie
S. Corinna BILLE
Fille du peintre-verrier Edmond Bille, S. Corinna, née à Lausanne en 1912, découvre avec passion la vocation de l’écriture à l’âge de 15 ans. Après un séjour à Paris et l’échec de son premier mariage, elle regagne définitivement le Valais, fait paraître son premier roman Théoda, (1944), et devient l’épouse de l’écrivain Maurice Chappaz en 1947. Son second roman, Le Sabot de Vénus, (1952), puis les recueils de nouvelles, Douleurs paysannes (1953) et L’Enfant aveugle, (1955) restituent le climat des villages de montagne, les parfums de la végétation alpestre, les passions et les silences des femmes en noir, une extraordinaire présence des êtres et des choses. Deux oeuvres charnières, La Fraise noire, (1968) et Juliette éternelle (1971), ouvrent la voie vers une création où le fantastique prend de plus en plus d’ampleur, et vers La Demoiselle sauvage (Bourse Goncourt de la nouvelle en 1975).
Dès l’époque de Théoda, la romancière cherche un langage nouveau pour exprimer les remous et les fausses notes de la vie intérieure, un langage aigu, irrationnel et direct (“Si je choisissais la réflexion / Le monde se fermerait”) ; parallèlement, ses carnets personnels se couvrent de récits de rêve, notés le matin à la hâte, et d’une palette sensorielle extrêmement riche. Ce foisonnement continu de l’inconscient ne cessera plus de nourrir son oeuvre à partir de 1973. L’emploi systématique du rêve est perceptible dans Cent petites histoires cruelles (1973) et Cent petites histoires d’amour (1978), textes brefs, à mi-chemin entre le récit et le poème en prose. Les derniers recueils de nouvelles, Le Salon ovale (1976) et Le Bal double (1980) sont d’une imagination débordante, tandis que des romans autobiographiques, Oeil-de-mer, Forêts obscures verront le jour quelques années après sa mort qui survient, inattendue, en 1979, au lendemain d’un voyage en Transsibérien.
(Extrait de la postface de Maryke de Courten, S.Corinna Bille, Emerentia 1713, Editions Zoé, Genève, 1994)